Au Au commencement était le mot
 

1.- Au temps de Jésus, le mot bain ou baptême s´applique à toutes sortes d´ablutions (Mc 7,4 ;Hb 9,10), au baptême des prosélytes (Mt 23,15), au baptême des sectes juives, au baptême de Jean (Mc 1,4), au baptême de Jésus (Mc 1,9-11 ;cf. Jn 3,22 ;4,2) et, tout spécialement, au baptême chrétien qui incorpore au Christ Ressuscité. Ainsi l´on parle de baptiser au nom du Christ (Ac 2,38), en Christ (Ga 3,27;Rm 6,3), dans le Seigneur Jésus, ou bien dans l´esprit saint (Ac 19,3.5 ;Mc 1,8 ; Jn 1,32-33). Pour l´intérêt très spécifique qu´ils présentent ( en fin de compte, ils constituent différents points de référence) arrêtons-nous sur chacun d´entre eux, puisqu´ils appartiennent au cadre religieux dans lequel naît le baptême chrétien.

2.- En premier lieu, le baptême des prosélytes (La Misná, Pesachín VIII,8). Tous les païens qui se convertissaientt au judaïsme devaient se soumettre à un triple rituel :   la circoncision, le baptême et l´offrande (cf. Nb 15,14-16). On exigeait d´eux une catéchèse préparatoire après les avoir préalablement questionnés sur les motifs de leur conversion. Dans le Talmud, la liturgie du baptême prévoit un interrogatoire où le candidat apporte une réponse qui a valeur de profession de foi. Les témoins garantissent la foi du baptisé. Tandis que les prosélytes pénétraient dand la piscine, les rabbins récitaient certains commandements de la loi, rappelant ainsi au postulant les points fondamentaux de la doctrine. Il semble que, dans certains cas, ils utilisaient une formule au nom du ciel ou pour l´amour du ciel. Le baptême devait se faire, autant que possible, avec de l´eau courante, qui possédait les meilleurs propriétés (cf. Didajé VII,1-4). Le prosélyte qui venait d´être baptisé était comme un nouveau-né,  ou néophyte, pour qui commençait une vie nouvelle.

3.- Il existait aussi le baptême  des sectes juives, par exemple entre les Esséniens de Qumram. Flavius Josèphe (De bello judaico II,8,7) parle d´une longue épreuve à laquelle étaient soumis les nouveaux membres. Un premier examen décidait de l´admission du candidat à titre de postulant. Pendant un an, il devait s´exercer à la vie essénienne. Si l´épreuve était concluante, il était admis dans la communauté (conventuelle), mais il ne pouvait encore jouir de ses privilèges, ni de la pratique commune des bains de pureté. A la fin de la deuxième année, il entrait dans les eaux saintes de la purification et il participait au banquet sacré. Le baptisé s´engageait à observer la loi de Moïse et il commençait une vie nouvelle pour donner des fruits de conversion. Il est dit dans la Règle de l´Union : « Alors, Dieu purifiera dans sa vérité toutes les actions de l´homme et il se rendra ainsi sain le corps de chacun, afin d´éliminer tout esprit d´iniquité de sa chair et de l´assainir par l´Esprit Saint de tout acte d´impiété. Et lui répandra sur l´homme l´Esprit de vérité comme une eau lustrale, pour l´absoudre de toutes les abominations et tromperies » (4,19-22).

4.- Le baptême de Jean s´adresse à tous les hommes sans exception : pêcheurs, païens, pharisiens, saducéens (Mt 3,7-10 ;Lc 3,12-14). Il dénonce la fausse illusion d´une appartenance seulement charnelle. Il ne suffit pas d´avoir pour père Abraham. Cela ne sevirait à rien sans la pratique de la justice (Mt 3,8). Il s´agit d´un baptême de conversion pour le pardon des péchés (Mc 1,4). Il prétend préparer au Seigneur un peuple bien disposé (Lc 1,17). Jean rend témoignage de ce que le Messie est présent : Et moi, je ne le connaissais pas, mais celui qui m´a envoyé baptiser dans l´eau, celui-là m´avait dit : « Celui sur qui tu verras l´Esprit descendre et demeurer, c´est lui qui baptise dans l´Esprit Saint .» Et moi, j´ai vu  et je témoigne que celui-ci est l´Élu de Dieu (Jn 1,33-34). La communauté de Jean est provisoire : elle sert à préparer le chemin de Celui qui baptisera dans l´Esprit Saint et le feu (Mt 3,11).

5.- Le baptême de Jésus marque la fin de la mission de Jean et inaugure la mission de Jésus.  Le baptême manifeste que Jésus est rempli de l´Esprit. On ne donne guère de détails, mais l´expérience st décrite avec ces images : les cieux s´ouvrent (Ez 1,1 ;Is 63,19), l´Esprit descend (Is 42,1 ;Ez 36,5 ;Jl 3,1), on entend une Parole (Ps 2,7 ;Is 42,1-3 ;Mt 3,17). L´Esprit de Dieu vient sur Jésus, son Fils bien-aimé, et il repose sur lui (Is 11,2), parce que, en lui, il se trouve comme dans un nid (Mt 3,16). Et ce nid a toute sa complaisance.

6.- Le baptême chrétien  est un bain dans l´Esprit : Jean, lui, a baptisé avec de l´eau, mais vous, c´est dans l´Esprit Saint que vous serez baptisés (Ac 1,5). L´Esprit est don de Dieu qui se donne à celui qui reçoit le baptême (Ac 2,38 ;Rm 5,5). De plus, il est le signe de la présence du Christ ressuscité dans le croyant . Ainsi parle Jésus : « Si quelqu´un a soif, qu´il vienne à moi, et il boira, celui qui croit en moi ! » Selon le mot de l´Écriture : De son sein couleront des fleuves d´eau vive. Il parlait de l´Esprit que devaient recevoir ceux qui avaient cru en lui ; car il n´y avait pas encore d´Esprit, parce que Jésus n´avait pas encore été glorifié (Jn 7,37-39). Le baptême dans l´Esprit est le bain de régénération par lequel l´homme naît de nouveau (Jn 3,3)- il naît d´en haut- l´effusion que répand Jésus sur ceux qui croient en Lui, la grâce de l´Évangile : un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême ; un seul Dieu et Père de tous, qui est au-dessus de tous, par tous et  en tous (Ep 4,5-6 ;cf. 1 Co 6,11). Et aussi : La vie éternelle, c´est qu´ils te connaissent, toi, le seul véritable Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus Christ (Jn 17,3).

7.- L´Esprit apparaît dans l´Écriture comme le don de Dieu  (Ac 29 ;Jn 4,10), que Dieu seul peut communiquer, puisque, en réalité, il se donne lui-même. C´est alors qu´on dit que l´Esprit est donné ou répandu (Ac 5,32 ;8,18 ;Jn 3,34 ;14,16 ;1 Jn3,24 ;Rm 5,5 ;2 Co 1,22 ; 2 Tm 1,7 ;1 Th 4,8). Tout ce qui se produit depuis Dieu se produit dans l´Esprit. Le Symbole de la foi dit littéralement, selon le texte original grec : Je crois en esprit saint. Ici, comme dans différents textes du Nouveau Testament (Jn 1,33 ;Mc 1,8), apparaît le mot esprit saint sans article pour se référer au don de Dieu donné à ceux qui croient au Christ. Par ce don-même, le Seigneur glorifié continue à être présent entre les siens, ainsi que le Père. Ainsi le dit Jésus : Si quelqu´un m´aime, il gardera ma parole, et mon Père l´aimera et nous viendrons vers lui et nous nous ferons une demeure chez lui (Jn 14,23). Conformément aux paroles de Jésus (Lc 24,49), l´envoi de l´Esprit vient aussi bien du Père que du Fils : l´Esprit est esprit des deux, et il est envoyé par les deux.

8.- Le baptême suppose purification(1 Co 6,11 ;Ep 5,25-26), nouvelle naissance (Jn 3,3-5 ;Ga 4,29), régénération (Tt 3,5-8), illumination (Ep 5,8-14). Saint Pierre dit : Comme des enfants nouveau-nés, désirez le lait non frelaté de la parole, afin que, par lui, vous croissiez pour le salut (1 P 2,2). Le baptème suppose croissance et, aussi, une conduite exemplaire (2,12), une vie exemplaire (2,12), une vie nouvelle (Rm 6,4). Clément d´Alexandrie (mort vers 215) exprime ainsi la profondeur du mystère : « Baptisés, ils sont illuminés ; illuminés, ils sont adoptés comme des enfants ; adoptés comme des enfants, ils deviennent parfaits ; devenus parfaits, ils reçoivent l´immortalité... Cette opération reçoit des noms très divers : don ou charisme, illumination, perfection, bain » (Paedagogus 1,6). De même, Saint Grégoire de Nazianze (IVº siècle) : « Tous ces noms proviennent de la joie que nous donne le baptême (et de fait, nous ne faisons que jouir,en lui attribuant différents noms, de ce que nous aimons passionnément) et de la multitude des biens qu´il nous apporte. C´est pour cela que nous l´appelons don, grâce, illumination, revêtu de l´immortalité, eau de régénération, sceau de Dieu, et tous les termes d´honneur que nous pouvons lui attribuer. Don et grâce, parce qu´il est totalement gratuit ; bain, parce que le péché demeure enfoui dans l´eau ; illumination, parce qu´il est la lumière qui transforme l´âme ; sceau, parce qu´il nous garde et nous protège, signifiant ainsi le pouvoir absolu de Dieu sur nous » (Oratio XL,4).

9.- Baptisés dans le Christ Jésus, nous sommes marqués d´une onction indélébile, comme Jésus lui-même, et cette onction du chrême « vient de l¨Esprit Saint », affirme Saint Cyril de Jérusalem (Mystagogica 3,1). À la même époque (IVº siècle) Saint Hilaire dit : « Le Seigneur nous a ordonné de baptiser au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, c´est à dire en faisant profession de foi de l´origine (auteur), du Fils unique et du don. Unique est l´origine, puisqu´il n´y a qu´un seul Dieu Père de qui tout procède ; et un seul est le fils unique notre Seigneur Jésus Christ, par lui tout existe ; et un seul est l´Esprit, qui est don de tout en tout »(Adversus Arrianos 2,19. Et cependant, dit Tertulien, au cours du   IIIº siècle, les trois formules du baptême se sont développées nettement plus que ce que le Seigneur avait déterminé (De corona 3). Et au cours des siècles suivants, encore davantage.

 

Dialogue : Sur ce qui nous paraît le plus important.